Ce que l’on appelle aujourd’hui “art brut” a reçu pendant longtemps l’appellation “art des fous”. Zoom sur une forme d’expression artistique qui a fait du chemin. L’art brut a migré des hospices aux galeries en passant par les revues scientifiques.
Ce que l’art brut est
Cette forme d’art était celle des personnes ayant perdu la raison, les personnes communément appelées “les fous”. Ce n’était pas aussi raffiné qu’une production Desenio affiches contemporaine, mais c’était quasiment le seul moyen trouvé par ces patients pour extérioriser leurs tourments.
Puis il a commencé à évoluer vers des points de vue de la sociologie et du monde de l’art. L’art brut est un cri, une révolte, une envie viscérale de montrer un univers intérieur. Les tenants de cette forme artistique n’aspirent pas au statut d’artiste. Ces personnes ont juste envie de s’exprimer. Cette auto-exclusion des courants et marchés artistiques fera que certains les qualifieront de rebelles, de marginaux.
Cependant, une analyse du point de vue de ces artistes à part fait prendre conscience que refuser la société ne signifie pas (toujours) se mettre en marge de la société. C’est plutôt décider quand on souhaite partager la compagnie des autres humains et quand on ne le souhaite pas. Se tenir à l’écart, c’est également prendre du recul pour mieux se voir et avoir une perception plus globale de la société. L’idée de pouvoir établir un contact direct avec l’essence de la société obéit à ce désir quasi ésotérique de passer au travers des corps, des apparences pour trouver l’essence des choses, des êtres et des concepts.
C’est Jean Dubuffet qui est considéré comme un des créateurs de l’art brut. Ce dernier concentre essentiellement des artistes n’ayant reçu aucune formation artistique. Cependant, la force de leurs œuvres les différencie des arts primitifs et naïfs. Les artistes du segment “art brut” ont conscience du monde, de ses canons et de ses dogmes artistiques. Parfois ils les utilisent, mais pour mieux les détruire, montrer qu’il est possible de s’en passer. Leur processus de démolition a aussi un intérêt : empêcher une évaluation des œuvres d’art brut avec la grille d’analyse classique, moderne ou contemporaine.
Leurs œuvres sont censées permettre la naissance dans le for intérieur des personnes qui les regardent de sentiments extrêmement vifs, voire contradictoires et gênants. Les œuvres d’art brut sont un caillou dans la chaussure de la société contemporaine, une épine dans le pied utilisé par la société bien-pensante pour se mouvoir, un grain de sable dans les mécanismes huilés du conformisme.
Comment l’art brut naît ?
L’art brut émerge dans la deuxième partie du XIXe siècle avec les premiers regards sur les œuvres de ces personnes classées en marge de la société. Le cheminement de cette forme d’expression artistique se poursuit au XXe siècle avec l’attention que les médecins soignant les troubles mentaux vont consacrer à l’art produit par ces patients. L’étape suivante consistera à soigner des personnes atteints de troubles psychiques en les incitant à dessiner.
Plusieurs médecins tels que Paul Meunier vont contribuer à la progression de l’art brut en signant des études scientifiques sous des noms d’emprunt.